Michel AGIER, Directeur d’études à l’EHESS
Catherine BONVALET, Directrice de recherche à l’INED
François DUBET, Professeur à l’Université de Bordeaux, Directeur d'études à l'EHESS
Yankel FIJALKOW, Professeur à l’Université du Maine
Claire LÉVY-VROELANT, Professeure à l’Université de Paris VIII
Serge PAUGAM, Directeur de recherche au CNRS, Directeur d’études à l’EHESS
Thèse soutenue à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales
Depuis quelques années, la question du logement a surgi dans l’actualité, et avec elle la problématique du logement insalubre. À Paris, une politique volontariste de résorption du logement dégradé a été mise en place depuis 2002. Cette thèse a pour objet l’étude des « carrières » des occupants des immeubles visés par cette politique. Il s’agit donc d’étudier la trajectoire résidentielle et les expériences vécues de cette population, et le rapport spécifique qu’elle entretient avec les institutions. Cette recherche s’appuie sur une enquête auprès d’un échantillon de plus de 500 mal logés interrogés à deux reprises en deux ans, et sur un travail ethnographique. Les mal logés, aux conditions de vie et aux situations sociales hétérogènes, se heurtent à des blocages sur les marchés immobiliers privé et public. Ils ne sont pas dépourvus de capacité d’action, mais l’expérience du logement dégradé est vécue avec douleur et désespoir. Leurs attitudes face aux institutions varient en fonction des positions dans l’espace social et des inégalités face au dispositif de relogement. Les personnes qui ont peu d’espoir de parvenir à un logement de qualité par leurs propres moyens et qui ne rentrent pas dans les catégories conduisant au relogement prioritaire, vivent cette situation comme une injustice, et ce d’autant plus qu’elles sont souvent les mieux dotées en atouts sociaux. Des tensions apparaissent entre ces mal logés, qui éprouvent un sentiment de légitimité à bénéficier de l’action publique, et les plus disqualifiés socialement que l’insalubrité extrême de leur logement implique de reloger en priorité. En éclairant les destins résidentiels des mal logés, cette thèse analyse aussi la question du relogement et du « passage » vers une nouvelle vie, ainsi que le cas de ceux dont la situation reste irrésolue. En filigrane, ce travail pose la question des implications des politiques sociales fondées sur l’urgence, qui se restreignent à régler les problèmes à la marge, dans leurs manifestations les plus extrêmes.