Isabel De CARVALHO, Professeur associé à l’Instituto Superior de Ciências do Trabalho e da Empresa (Lisbonne)
Joao FREIRE, Professeur à l’Instituto Superior de Ciências do Trabalho e da Empresa (Lisbonne)
Serge PAUGAM, Chargé de recherche, CNRS-OSC/LSQ
Dominique SCHNAPPER, Directrice d’Etudes à l’EHESS
Thèse soutenue à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris
L’hypothèse initiale de cette recherche est que le statut du chômeur doit être moins difficile à supporter au Portugal que dans d’autres pays européens tels que la France étant donné que, dans ce pays, beaucoup d’individus n’ont pas intériorisé à la fois la logique de la condition salariale et celle de l’Etat-providence et qu’on y trouve une intégration sociale assez forte ainsi qu’une activité souterraine intense. Nous avons choisi d’étudier le sens que les individus, touchés par le chômage, au Portugal, donnent à cette expérience particulière de leur vie active. Pour cela, nous avons cherché à mettre en lien les facteurs structurels de l’expérience vécue du chômage avec l’examen des représentations que les demandeurs d’emploi se font de leur situation et de la manière dont ils la vivent.
A partir de l’étude des facteurs structurels, nous avons pu déduire le type-idéal su chômage au Portugal. Ce type-idéal est celui d’un individu peu stigmatisé en raison d’un faible degré de protection de la part de l’Etat-providence, d’un attachement à la condition de salarié peu considérable conjugué à une forte obligation normative des familles de prendre en charge leurs membres lorsqu’ils sont au chômage. Cet individu pourrait donc bénéficier de diverses compensations économiques (au risque, dans certains cas, d’un grand appauvrissement de la famille), sociales et identitaires, grâce à une intégration sociale relativement forte accompagné de solidarités organisées à partir de la famille et du travail au noir. Il semble donc que le chômeur type au Portugal serait, tout à la fois, relativement peu sensible, d’un point de vue identitaire, aux altérations dont ferait l’objet sa vie professionnelle, et modérément touché par le traitement social et institutionnel qui s’en suivrait. Par ailleurs, il pourrait aisément trouver, au sein de son réseau de solidarité, de quoi compenser partiellement le fait d’être sans emploi.