En devenant le garant d’une organisation solidariste de la société, l’État a permis aux individus d’être moins dépendants de leurs attaches traditionnelles, notamment, la famille, le voisinage, le village, c’est-à-dire de l’ensemble des protections rapprochées. Cela signifie que l’individu peut aujourd’hui appartenir et participer à de multiples groupes sans en dépendre, ce qui lui assure une plus grande conscience de son individualité. Le développement d’un système de protection sociale généralisée a donc historiquement renforcé l’autonomie de l’individu et contribué à diversifier les liens qui le rattachent à la société. Mais ces liens sont potentiellement fragiles, notamment en période de crise, ce qui renforce le risque de ruptures cumulatives et de disqualification sociale pour des franges nombreuses de la population. Ce risque est toutefois inégal d'une société à l'autre. Dans le prolongement du séminaire de l'année dernière, il s'agira d'analyser comment les liens sociaux sont entrecroisés de façon normative dans chaque société et comment à partir de cet entrecroisement spécifique se produit la régulation de la vie sociale. On reprendra dans ce sens la typologie des régimes d'attachement (familialiste, volontariste, organiciste et universaliste) en continuant de mettre à l’épreuve ce cadre analytique à partir de données empiriques issues d’enquêtes quantitatives ou qualitatives, réalisées aussi bien à l’échelle locale (dans les espaces urbains notamment) qu’à l’échelle nationale (comparaison de grandes enquêtes sur les conditions de vie et les valeurs). Le séminaire s’inscrira dans une démarche comparatiste en faisant appel à des spécialistes des sociétés européennes, mais aussi des États-Unis, de l’Amérique du Sud et de l'Asie.